L’apprentissage de l’orthographe lexicale, une méthode efficace ?

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Mis à jour le 09 Déc 2019

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Dans le processus d’apprentissage de la lecture et de l’écriture, des processus complexes sont à l’œuvre. Les apprenants doivent se familiariser avec l’alphabet (la graphie), la combinaison des lettres (les graphèmes) et les sons qu’elles produisent (les phonèmes). L’apprentissage de l’orthographe par la lecture a fait ses preuves auprès des apprenants. Néanmoins, la chercheure Natalie Chaves, de l’Université Paris-Est Créteil, s’est questionnée sur les effets des lectures-écritures sur l’apprentissage de l’orthographe lexicale chez les enfants de la deuxième à la cinquième année du primaire. En bref, elle a découvert qu’après cinq occurrences d’un mot, les élèves ont intégré sa forme orthographique. Cet article propose de jeter un coup d’œil à ses recherches.

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Influence de l’approche pédagogique choisie

Plusieurs mécanismes dynamisent l’apprentissage de l’orthographe. D’ailleurs, les différentes approches pédagogiques fournissent chacune une réponse qui leur est propre à ce défi. Chaves, dans un récent article, explore ces mécanismes.

Enseignement explicite

Dans l’enseignement explicite, trois étapes structurent l’enseignement, dans lesquelles les élèves sont exposés à la phonétique des mots à apprendre, pour acquérir les connaissances phonologiques nécessaires à la reconnaissance de ces mots, dans un premier temps, et les associer à leur forme écrite, dans un second temps (correspondances phonographémiques). La rétroaction de l’enseignant est ensuite requise pour que les élèves « intériorisent » la bonne correspondance entre la forme orale et écrite d’un mot.

Apprentissage par la lecture

Lorsque les apprenants ont acquis une connaissance de la forme orale et phonétique des mots, l’apprentissage par la lecture peut commencer. Ils peuvent alors décoder eux-mêmes les mots et en retenir l’orthographe. Bien que l’autoapprentissage ait ses limites et demeure efficient entre la première et la cinquième année (Cunningham, 2006; Share, 2004), ce processus demeure essentiel à l’apprentissage de l’orthographe lexicale.

Apprentissage par l’écriture

On souligne dans cet article que la mémorisation d’un mot et de son orthographe est influencée par le processus d’écriture. C’est la raison pour laquelle certains enseignants vont demander aux élèves d’écrire plusieurs fois les mots à l’étude. Toutefois, le nombre de répétitions varie d’un enseignant à l’autre et les résultats aussi. Chaves s’est donc interrogée sur le nombre de répétitions requises en lecture et en écriture pour retenir la forme orthographique d’un mot.

Combien de répétitions pour un effet maximal?

L’étude menée par Chaves avec des élèves de la deuxième à la cinquième année du primaire visait à mesurer leur performance en situation d’apprentissage de nouveau vocabulaire. Elle a observé que plus les élèves sont avancés dans leurs cursus, plus ils ont de facilité à intégrer de nouveaux mots dans leur lexique. Aussi, en comparant leurs scores, elle a remarqué qu’entre chaque lecture des mots à l’étude, les élèves amélioraient leurs connaissances orthographiques. Si cela s’est révélé vrai pour les premières lectures, Chaves souligne qu’après la cinquième lecture-écriture de ces mots, les élèves n’amélioraient plus, ou que marginalement, leurs compétences orthographiques.

Et qu’en est-il de la rétention à long terme?

L’étude de Chaves visait également à tenter de mesurer la capacité de rétention développée par les élèves avec ces exercices de lecture-écriture. Les résultats de ses recherches montrent par exemple que faire lire ou écrire plus de cinq fois des mots a des effets sur la rétention à long terme de l’orthographe lexicale. Ainsi, les élèves ayant fait l’exercice sept, huit, neuf ou dix fois avaient une meilleure capacité à se remémorer les mots enseignés, contrairement aux élèves n’ayant fait l’exercice que cinq fois ou moins.

Conclusion

En somme, le décodage est essentiel à l’apprentissage de l’orthographe lexicale pour les enfants. La répétition de mots nouveaux dans des exercices de lecture-écriture a une influence importante sur la rétention de nouvelles connaissances. Les effets positifs sont en effet visibles dès la cinquième lecture-écriture, et une rétention profonde est notable après sept occurrences d’un mot en lecture-écriture pour bien mémoriser sa forme orthographique.

Références

Chaves, N. (2019). L’apprentissage de l’orthographe par la lecture-écriture : combien d’occurrences pour favoriser l’acquisition? Nouveaux cahiers de la recherche en éducation, 21(2), 113-135. Repéré à https://www.erudit.org/fr/revues/ncre/2019-v21-n2-ncre04739/1061842ar/

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  • Lorsque j’ai lu le titre de cet article, je me suis sentie interpellée car je suis une enseignante en formation professionnelle et je suis aussi une mère d’un garçon de six ans. Deux univers différents, mais similaires en même temps! D’un côté, il y a mon fils qui est présentement en apprentissage de l’orthographe lexicale et de l’autre, je côtoie des adultes en formation qui ont vraisemblablement oublié comment lire et écrire! En effet, il fût prouvé que le français est l’une des langues les plus difficiles à apprendre. D’ailleurs, « eau » « au » et « o » ont tous le même son! Lequel utiliser? Et à quel moment? Avouons que pour des enfants la différence est presque incompréhensible, vous ne trouvez pas??
    Ce que je constate lorsque je fais les devoirs avec mon fils, c’est qu’il écrit au son. À titre d’exemple, pour le mot bateau, il écrit « bato ». Phonétiquement, c’est bien. Mais au niveau de l’orthographe, je dois intervenir auprès de lui afin qu’il soit en mesure d’assimiler correctement la phonétique du mot à la bonne orthographe! Parfois, ce n’est pas chose facile! Ce qui m’évoque le stade du « mot image » qui semble avoir disparu de l’école de mon fils.
    En vérité, je me questionne à différents sujets. À cet âge, comment assurer l’intégration de ces apprentissages? Est-ce grâce à l’enseignement explicite, à l’apprentissage de la lecture ou tout simplement le cheminement systématique du développement? Est-ce consciemment ou volontaire? Peut-on avoir une confiance absolue en la répétition des écrits et des essaies erreurs pour assurer l’éducation de l’orthographe lexicale? Peut-être. Mais quoi qu’il en soit, ces méthodes peuvent s’avérer peu suffisantes avec des enfants qui démontrent des troubles de l’orthographe!
    De nos jours, il est important de développer l’apprentissage de la langue et elle ne devrait pas se limiter au primaire. Au contraire, trop d’étudiants en formation professionnelles n’appliquent pas les apprentissages qu’ils ont acquis auparavant.
    Au final, il est vrai que la recherche de Nathalie Chaves confirme que la lecture des mots et leur écriture dans un contexte d’apprentissage produisent un certain rendement. Cependant, je crois qu’il existe d’autres méthodes possibles de transmettre ce type d’apprentissage tout en s’amusant mais surtout sachez qu’il existe des programmes d’entrainement que tout le monde peut utiliser afin de devenir efficaces à long terme. À nous, enseignants et parents de s’en servir afin de mieux accompagner les enfants.

    Julie Bouchard