La détresse psychologique des étudiants universitaires
Certaines statistiques sur la détresse psychologique des étudiants universitaires [1] sont préoccupantes, et l’on peut se demander si l’enseignement supérieur ne rend pas malades ses apprenants. Le présent article jette un bref regard sur ce phénomène et ses impacts sur l’apprentissage, et propose des pistes de soutien à l’intention des étudiants.
par France Dumais
Coordonnateur au Service de soutien à la formation (SSF) de l’Université de Sherbrooke, Jean-Sébastien Dubé a publié un texte dans l’infolettre Perspectives SSF d’octobre 2018. Il y présente entre autres des données d’enquêtes sur la détresse psychologique d’étudiants universitaires montréalais, dont les suivantes :
- À l’Université McGill, 30 % des étudiants se disent anxieux ou dépressifs, ou souffrent de stress sévère; en cinq ans, les demandes d’aide ont augmenté de 25 %;
- À l’Université de Montréal, environ 20 % des étudiants présentent des signes dépressifs, et 8 % ont eu des idées suicidaires.
Psychologue depuis plus de 30 ans à l’Université de Sherbrooke, Johanne Bernatchez, directrice du Service de psychologie et d’orientation aux Services à la vie étudiante, peut témoigner de cette évolution :
C’est vrai que l’on constate une hausse des demandes, qui ont doublé depuis 10 ans. Les problèmes qui nous sont présentés sont de plus en plus complexes, incluant souvent des composantes relationnelles, familiales, financières, etc.
L’anxiété chez les étudiants
Dubé expose aussi des données d’enquêtes sur l’anxiété des étudiants qui fréquentent les universités américaines (colleges). Par exemple :
- Plus de 25 % d’entre eux présentent des symptômes d’anxiété;
- Plus de 40 % des étudiants de première année se sentent dépassés par tout ce qu’ils ont à faire;
- Près de 75 % des étudiants qui ont été suivis en counseling disent que cela a amélioré leur rendement scolaire.
La psychologue Johanne Bernatchez reconnaît que certains étudiants reçus en consultation au Service de psychologie et d’orientation de l’Université de Sherbrooke présentent des manifestations anxieuses (ex. : palpitations, troubles du sommeil, pensées craintives), mais ajoute que celles-ci disparaissent lorsque les sources de stress s’en vont (ex. : période des vacances). Elle tient d’ailleurs à les distinguer des véritables troubles anxieux (ex. : trouble panique, agoraphobie), qui sont de nature plus sévère, plus souffrante et persistante et qui peuvent nécessiter un traitement pharmacologique.
Les impacts de la détresse psychologique sur l’apprentissage
Selon Bernatchez, les étudiants en détresse (souffrant de troubles anxieux ou montrant des manifestations anxieuses) pourront éprouver des difficultés d’attention, de concentration, et même des problèmes de mémoire. Il faut savoir que les études universitaires incluent des moments stressants qui demandent de nombreuses adaptations de la part des étudiants (ex. : vie en appartement, gestion d’un budget, exigences académiques, évaluations). Il est donc possible que le stress et l’angoisse portent certains étudiants à être moins ouverts aux nouvelles méthodes pédagogiques, car celles-ci exigent de prendre des risques et de s’investir.
[Le collège peut-il protéger contre la dépression?]
Le rôle des professeurs
Du point de vue des étudiants, les professeurs et chargés de cours demeurent des modèles de rôle en termes de réussite et de vie épanouie. Plusieurs étudiantes et étudiants font confiance à ces modèles et se tournent vers eux lorsqu’ils sont désemparés.
Parmi les pistes de soutien existantes pour accompagner les étudiants universitaires, Dubé mentionne :
- les services de soutien psychologique (ex. : service de psychologie et d’orientation);
- la méditation;
- les loisirs;
- les ateliers préparatoires avant l’entrée en première année;
- la formation du personnel pour donner les « premiers soins psychologiques ».
De son côté, Bernatchez suggère que les professeurs et les chargés de cours prennent le temps d’accueillir les étudiants en détresse qui viennent vers eux, de leur parler et, si nécessaire, de les orienter vers un service de soutien psychologique ou un autre service adéquat.
Un enseignant qui parvient malgré tout à maintenir une vie équilibrée avec des intérêts diversifiés et la possibilité de prendre le temps de converser avec ses étudiantes et étudiants peut néanmoins devenir un modèle de santé mentale. Prêcher par l’exemple demeure une valeur sûre.
[Pour consulter l’article : https://www.usherbrooke.ca/ssf/veille/perspectives-ssf/numeros-precedents/octobre-2018/le-ssf-veille/detresse-psychologique-des-etudiants/]
Référence :
Dubé, J.-S. (2018, octobre). Détresse psychologique des étudiants : les études universitaires rendent-elles malade? Perspectives SSF. Article publié dans le site de veille du Service de soutien à la formation (SSF) de l’Université de Sherbrooke. Repéré à www.usherbrooke.ca/ssf/veille/perspectives-ssf/numeros-precedents/octobre-2018/le-ssf-veille/detresse-psychologique-des-etudiants/
[1] Le masculin est utilisé pour alléger le texte, et ce, sans préjudice pour la forme féminine.
Source de l’image : Pixabay/ruanshunyi
Articles similaires
Wikipédia : le type de contribution comme gage de qualité
Le style de collaboration à la rédaction d’articles sur Wikipédia a un effet direct sur la qualité de ceux-ci.
Voir l’articleLa voie de la réussite, la voix des étudiants
Les attitudes et les comportements scolaires sur lesquels s’appuient ces deux grands concepts sont nommés par les étudiants eux-mêmes.
Voir l’articleVisite de stage : ce qui se joue entre stagiaire, enseignant associé et superviseur
Cet article vise à explorer les différentes dimensions de l’agir des acteurs impliqués dans la supervision des stages.
Voir l’articleCommentaires et évaluations
Contribuez à l’appréciation collective