De l’intégration à l’inclusion scolaire des élèves en difficulté d’adaptation et d’apprentissage
Le texte qui suit définit sommairement l’inclusion scolaire et présente les notions de base d’une pédagogie inclusive, adaptée aux élèves en difficulté d’adaptation et d’apprentissage. Il précise le rôle de la direction et les attitudes de l’équipe-école susceptibles de favoriser l’inclusion. Enfin, il présente les cinq conditions reconnues pour contribuer au succès de l’inclusion.
L’intégration scolaire désigne le fait qu’on place un élève ayant des besoins particuliers dans un environnement scolaire adapté à ses besoins, par exemple une classe spéciale dans une école régulière. Quant à l’inclusion scolaire, elle réfère plutôt au fait qu’on place cet élève, quelles que soient ses difficultés, dans une classe ordinaire correspondant à son âge et située dans l’école de son quartier (1, 2).
L’inclusion scolaire est apparue au début des années 1990. Elle traduit une vision novatrice et ambitieuse inspirée du concept d’intégration, proposé dans les années 1970. L’inclusion scolaire vise le développement des sentiments d’appartenance et d’acceptation des élèves ayant des besoins particuliers, ainsi que la mise en place de mesures de soutien favorisant l’apprentissage de ces élèves à l’intérieur de programmes réguliers (2, 3). Une pédagogie inclusive se traduit notamment par une adaptation des approches dans le but de soutenir ces jeunes dans leur classe. Comme le rapporte Saint-Laurent (3), le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) (2006) reconnaît dans sa politique d’inclusion les services éducatifs offerts hors des programmes réguliers. Cette politique prévoit que les services aux élèves handicapés ou en difficulté sont établis sur la base d’une évaluation personnalisée de leurs capacités et de leurs besoins. À la suite de cette évaluation, l’élève est, dans la mesure du possible, inclus dans une classe régulière ou obtient des services éducatifs dans le milieu le plus naturel pour lui et le plus près de sa résidence.
Qui sont les élèves ayant des besoins particuliers ?
L’inclusion scolaire vise deux catégories d’élèves ayant des besoins particuliers : ceux qui présentent un handicap (déficience intellectuelle, motrice, langagière, visuelle, auditive ou atypique, troubles envahissants du développement ou troubles relevant de la psychopathologie) ; et ceux qui présentent des difficultés d’adaptation ou d’apprentissage (problèmes de comportement, trouble de déficit d’attention avec hyperactivité (TDAH), dyslexie, etc.) (4, 5). Nous aborderons uniquement les conditions favorisant l’inclusion de la seconde catégorie – ce qui n’exclut pas qu’elles puissent s’appliquer à la première.
Rôle de la direction et attitudes préalables de l’équipe-école
L’inclusion scolaire est une démarche complexe. Aussi, avant d’apporter des changements en classe, les responsables du projet doivent se mobiliser et tendre vers une vision commune. Rousseau, Vézina et Dionne (2008) proposent que les acteurs engagés dans cette démarche (direction, enseignants, professionnels de l’intervention, etc.) prennent d’abord le temps de définir leur vision, non seulement de l’inclusion scolaire, mais encore de l’éducation en général ; de préciser leurs conceptions de notions comme les apprentissages, la motivation, la réussite ou la différence. Ces mêmes auteures mentionnent aussi que la direction de l’école doit être porteuse du projet d’inclusion. Les divers acteurs impliqués se mobiliseront d’autant plus s’ils sentent qu’ils ont l’appui de la direction, mais aussi que celle-ci renforce au quotidien l’implication des membres de l’équipe. En effet, la réussite de la tâche globale est tributaire des tâches individuelles de chaque membre de l’équipe. La direction doit donc intégrer des personnes désireuses de s’impliquer, ouvertes aux changements et présentant surtout de bonnes capacités d’adaptation (flexibilité), puisqu’elles pourraient faire face à des imprévus.
Des conditions reconnues pour contribuer au succès
Dans le cadre d’une recherche portant sur les attitudes des enseignants en regard des conditions favorisant l’inclusion scolaire, Bélanger (2006) met en évidence cinq cibles d’intervention qui sont autant de conditions pour faciliter la démarche d’inclusion et en assurer le succès.
1- L’adaptation et la diversification de l’enseignement (1, 6, 7)
Dans un premier temps, un enseignant peut adapter son enseignement, et ce, de plusieurs façons. Proposer un enseignement plus concret prenant appui sur des supports physiques, reformuler les consignes ou les explications, renforcer les comportements attendus ou proposer plusieurs courtes séances de travail plutôt qu’une seule longue séance. Dans un deuxième temps, un enseignant peut aussi diversifier son enseignement. Il peut par exemple mettre à profit l’enseignement coopératif en demandant à un élève d’expliquer aux autres des points de matière, jumeler un élève plus avancé et un élève présentant des besoins particuliers dans le cadre d’un travail en équipe, ou encore profiter de ce moment libre pour fournir une aide individualisée. Il pourrait aussi offrir des moments de récupération à des élèves pour qui certaines notions demeurent incomprises. Tout en facilitant la tâche de l’enseignant, l’enseignement coopératif permet aux élèves de s’entraider et de se soutenir. Précisons que l’adaptation et la diversification de l’enseignement doivent viser à répondre aux besoins particuliers de certains élèves, mais sans négliger ceux du reste du groupe.
2- La collaboration entre les membres de l’équipe de travail et avec les parents
Il faut souligner l’importance de la collaboration entre les enseignants (1, 6). Lorsqu’elle s’établit, un sentiment d’appartenance se développe et les enseignants se sentent plus soutenus. La cohésion qui croît entre eux se reflète progressivement dans leurs interventions qui gagnent en uniformité. L’établissement d’une collaboration offre aussi aux enseignants l’occasion de partager leur expertise et leur méthode de travail (gestion de classe, échange de matériel, etc.). Il devient aussi plus aisé de discuter de situations difficiles et de travailler de concert en adoptant des méthodes de résolution de problème. Mais la collaboration entre enseignant et orthopédagogue (1, 7), psychoéducateur, travailleur social, etc., apparaît tout aussi primordiale. Cette collaboration permet notamment d’établir des objectifs d’apprentissage synchrones et plus adaptés à la réalité des jeunes tout en offrant des occasions d’échange d’expertise. De plus, le soutien des parents (1, 6) s’avère précieux dans la réussite de la démarche d’inclusion scolaire. Une fois que la communication est établie entre le personnel de l’école et les parents, il se produit un échange d’informations pertinentes qui permet aux parents de reprendre plus facilement et de généraliser le travail de l’école à la maison.
3- L’ajout de ressources humaines(1)
La présence supplémentaire en classe d’un orthopédagogue, d’un psychoéducateur ou d’un deuxième enseignant peut soutenir plusieurs enseignants expérimentant l’inclusion scolaire. Non seulement l’enseignant a-t-il plus de temps pour les autres élèves, mais il peut aussi mieux les encadrer.
4- La formation reçue par les enseignants
Bélanger (1) a mis en évidence le fait que la formation outille les enseignants pour mieux répondre aux besoins particuliers de certains élèves et surmonter les difficultés qu’ils rencontrent. Bien entendu, avec l’expérience, il est plus aisé pour les intervenants scolaires de réagir face à des situations complexes. Cependant, plusieurs enseignants soulignent l’importance d’acquérir et d’approfondir leurs connaissances en matière d’adaptation scolaire et principalement sur les plans de la psychologie et de la pédagogie. En ce sens, la formation continue et la participation à divers événements (congrès, colloques, etc.) permet d’actualiser et d’approfondir les connaissances sur les difficultés des élèves, l’origine de ces difficultés et les façons d’intervenir auprès d’eux pour y remédier (planification des programmes et stratégies d’enseignement, techniques de gestion de classe ou des comportements difficiles, etc.).
5- On remarque que la mise sur pied d’un programme de soutien ou d’aide aux intervenants scolaires(6) tend à se créer naturellement et de façon informelle lorsqu’un milieu s’engage dans une démarche d’inclusion. Concrètement, il peut être question de rencontres hebdomadaires au cours desquelles les intervenants échangent sur les difficultés qu’ils rencontrent, sur des méthodes de résolution de problèmes. L’expertise de consultants peut aussi être requise lors de l’implantation du projet d’inclusion. L’important, c’est que les acteurs ne se sentent pas seuls à porter les difficultés.
Conclusion
La réussite de la démarche d’inclusion scolaire constitue avant tout un succès d’équipe. Les attitudes de base des membres de l’équipe-école, qu’elles soient favorables ou non, influenceront nécessairement la démarche d’inclusion. En ce sens, il importe que les personnes désireuses de s’impliquer définissent leur vision de l’inclusion, de l’éducation, de même que leurs rôles respectifs. La direction doit aussi supporter les membres impliqués. Outre les attitudes préalables, le succès de la démarche d’inclusion dépend de diverses conditions et cinq d’entre elles ont été mises en évidence : l’adaptation et la diversification de l’enseignement, la collaboration entre les membres de l’équipe de travail et avec les parents, l’ajout de ressources humaines, les besoins de formation et l’implantation de programmes d’aide. Il est important de se rappeler qu’une démarche d’inclusion qui ne tient pas compte des conditions reconnues pour la favoriser risque d’échouer. Mais encore, une démarche inadéquate peut nuire à la qualité des interventions menées auprès des élèves – qu’ils aient des besoins particuliers ou non -, sans compter qu’elle peut créer de l’insatisfaction chez ceux qui la mettent en œuvre (enseignants, intervenants, membres de la direction, parents, etc.).
Citer ce document :
Potvin, Pierre et Lacroix, Marie-Ève (2009). De l’intégration à l’inclusion scolaire des élèves en difficulté d’adaptation et d’apprentissage. Document en ligne sur le Réseau d’information pour la réussite éducative.
(1) Bélanger, S. (2006). Conditions favorisant l’inclusion scolaire : attitudes des enseignantes du primaire. Dans C., Dionne et N., Rousseau (Éds). Transformation des pratiques éducatives. La recherche sur l’inclusion scolaire. Québec : Presses de l’Université du Québec.
(2) Dionne, C., & Rousseau, N. (2006). Transformation des pratiques éducatives : la recherche sur l’inclusion préscolaire et scolaire. Dans C., Dionne et N., Rousseau (Éds). Transformation des pratiques éducatives. La recherche sur l’inclusion scolaire. Québec : Presses de l’Université du Québec.
(3) Saint-Laurent, L. (2008). Enseigner aux élèves à risque et en difficultés au primaire. Montréal : Gaëtan Morin Éditeur.
(4) Ducharme, D. (2008). L’inclusion en classe ordinaire des élèves à besoins éducatifs particuliers. Montréal : Marcel Didier inc.
(5) Moreau, A. C., Maltais, C., & Herry, Y. (2005). L’éducation inclusive au préscolaire. Accueillir l’enfant ayant des besoins particuliers. Montréal : Les Éditions CEC inc.
(6) Rousseau, N., Vézina, C., & Dionne, C. (2006). Restructuration de l’organisation des enseignements au secondaire : la tâche globale comme soutien à la pédagogie inclusive. Dans C., Dionne et N., Rousseau (Éds). Transformation des pratiques éducatives. La recherche sur l’inclusion scolaire. Québec : Presses de l’Université du Québec.
(7) Massé, L. (2004). Stratégies d’enseignement pour une classe inclusive. Dans N., Rousseau et C., Dionne (Éds). La pédagogie de l’inclusion scolaire. Québec : Presses de l’Université du Québec.
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