Comment les parents décrivent-ils l’adaptation psychosociale des enfants doués et tout-venant durant la pandémie de la COVID-19 au Québec ?
Cet article compare l’adaptation de trois sous-groupes de jeunes (doués, doublement exceptionnels, tout-venant) durant la pandémie de la COVID-19. Les répondants et répondantes sont majoritairement des mères (97,4 %), âgées de 40 à 49 ans. Au début de la pandémie (mai 2020), ils ont rempli un questionnaire évaluant la santé mentale et l’adaptation de leur enfant. L’étude comporte 235 jeunes doués (31,5 %) et tout-venant (68,5 %). Ils sont âgés de 6 à 17 ans et proviennent de la province de Québec.
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Description globale de l’adaptation
Selon les parents, les jeunes parviennent généralement à s’adapter à la situation (respectivement 62,5 % des jeunes doués, 40,5 % de ceux ayant une double exceptionnalité et 73,9 % des tout-venant). Cependant, plusieurs jeunes présentent un risque de difficultés d’adaptation ou des difficultés cliniques, telles que des comportements intériorisés et extériorisés.
Influence des caractéristiques personnelles sur les difficultés d’adaptation
- Genre : Les garçons manifestent plus de comportements extériorisés que les filles.
- Appartenance à un groupe : Les jeunes doublement exceptionnels présentent plus de comportements intériorisés que les jeunes tout-venant. Ils présentent également plus de comportements extériorisés que les jeunes doués et tout-venant.
- Âge : Les enfants de 6 à 11 ans montrent plus de comportements extériorisés que les adolescents de 12 à 17 ans.
Comparaison des trois sous-groupes
Les jeunes doublement exceptionnels présentent plus de difficultés que les tout-venant dans plusieurs dimensions : anxiété, dépression, problèmes sociaux, problèmes de pensées, problèmes d’attention et comportements allant contre les règles. En ce qui concerne la dimension de comportements agressifs, les jeunes doublement exceptionnels présentent plus de difficultés par rapport aux jeunes tout-venant, mais également par rapport aux jeunes doués.
Conclusion
Plus de la moitié des jeunes doués et non doués s’adaptent à la situation pandémique et considèrent le confinement comme, entre autres, une occasion de pratiquer leurs activités personnelles. Cette adaptation aisée peut être attribuée à différents facteurs, tels que l’accès aux jeux vidéo ou aux réseaux sociaux, à la pratique d’un sport en famille, à la lecture, au dessin ou à l’autoapprentissage de nouvelles compétences. L’utilisation de stratégies d’adaptation, telles que la recherche du soutien social, peut également jouer un rôle positif. Toutefois, il est important de nuancer ces résultats, puisqu’un grand nombre de participants vient d’un milieu socio-économique favorisé, permettant un accès plus aisé aux ressources. Les résultats soulignent qu’un tiers des jeunes doués présenteraient un risque de difficultés intériorisées, telles que l’anxiété et la dépression, et de difficultés extériorisées, telles que des comportements déviants. Ce même résultat s’applique aux jeunes doublement exceptionnels, mais dans une plus grande mesure, avec plus d’un tiers concerné. En ce qui concerne les caractéristiques personnelles, les plus jeunes (6-11 ans) présentent davantage de difficultés extériorisées. Cela pourrait s’expliquer par la relation de proximité plus étroite avec leurs parents en comparaison à l’adolescence. Ils seraient alors plus en contact avec le stress éprouvé par les parents. De plus, pour les enfants plus jeunes, l’ennui, le manque de stimulation et l’éventuelle absence d’encadrement offert par les parents qui travaillaient en confinement peuvent expliquer les difficultés extériorisées, telles que des difficultés d’attention. Encore une fois, cela ne s’applique pas aux adolescents, ceux-ci étant plus indépendants. En ce qui concerne le genre, les garçons montrent davantage de comportements extériorisés que les filles. En comparant les trois sous-groupes, les jeunes doublement exceptionnels rencontrent significativement plus de difficultés que les doués et tout-venant. Cette tendance était déjà observée, mais a été amplifiée pendant la pandémie en raison de leurs besoins particuliers. Ainsi, en contexte de pandémie, une attention particulière devrait être portée aux jeunes doublement exceptionnels qui, dans notre échantillon, semblent rencontrer des difficultés d’adaptation plus importantes.
Références sur le sujet
Baudry, C., Lagacé-Leblanc, J., Massé, L., Pearson. J., Courtinat-Camps, A., Slater, E. et Ouellet, G. (2023). Parents’ perceptions of children’s psychosocial adaptation during COVID-19 pandemic in Quebec: Comparison with gifted and non-gifted children. SENG Journal: Exploring the Psychology of Giftedness. 2(1), 25-37. https://doi.org/10.25774/2qcg-b576
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