Amitié et risque de décrochage scolaire au secondaire : effet médiateur de la motivation scolaire
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Amitié, motivation et décrochage scolaire
Les pairs sont des agents sociaux importants pour les jeunes et les relations d’amitié significatives qui se tissent durant l’adolescence sont susceptibles de satisfaire les besoins psychologiques nécessaires au développement de la motivation. Celle-ci, à son tour, peut contribuer à diminuer le risque de décrochage scolaire.
Partant de cette prémisse, la chercheuse examine les processus motivationnels en tant que médiateurs du lien entre la qualité de la relation avec le meilleur ami et le risque de décrochage scolaire au secondaire. En s’appuyant sur la théorie de l’autodétermination de Ryan et Deci[1], elle retient les variables suivantes : la motivation autonome, la motivation contrôlée et l’amotivation scolaire.
La chercheuse pose trois hypothèses :
- Une relation d’amitié de qualité vécue à l’école est associée négativement au risque de décrochage scolaire et ce lien est médiatisé par une motivation autonome élevée chez l’élève.
- Une relation d’amitié de faible qualité est positivement associée au risque de décrochage scolaire et ce lien est médiatisé par une motivation hautement contrôlée.
- Une amitié de faible qualité est positivement associée au risque de décrochage scolaire, ce qui se manifeste par de l’amotivation scolaire.
Méthodologie de l’étude
Une collecte de données par questionnaire a été menée dans deux écoles secondaires publiques francophones situées dans des quartiers défavorisées de la rive sud de Montréal. L’échantillon compte 225 élèves (67% de filles) de troisième année du secondaire.
Des relations différentes avec le décrochage scolaire
Les résultats de la recherche montrent que les trois processus motivationnels retenus par la chercheuse semblent avoir des relations différentes avec le risque de décrochage scolaire. En effet, l’analyse met en évidence qu’une motivation hautement autodéterminée (autonome) est associée à un faible risque de décrochage et qu’une tendance contraire s’observe lorsque la motivation de l’élève est hautement contrôlée ou amotivée. En fait, l’amotivation apparaît comme un médiateur marginalement significatif du lien entre une relation d’amitié de faible qualité et un risque de décrochage élevé.
La chercheuse constate également que malgré les différences de genre observées sur les niveaux moyens des variables à l’étude, comme la qualité de la relation d’amitié par exemple, il n’y a pas de différence dans la manière dont ces variables s’entre-influencent chez les garçons et chez les filles.
Pour l’auteure de l’essai présenté comme exigence partielle du Doctorat en psychologie, les résultats obtenus mettent en lumière l’importance de considérer le contexte social et en particulier le rôle des meilleurs amis dans le développement de programmes d’intervention visant à prévenir le décrochage scolaire.
Quelques pistes d’intervention
En guise de conclusion, l’essai propose des pistes d’intervention qui peuvent être appliquées en milieu scolaire ainsi que des réflexions sur le rôle du psychologue scolaire dans la prévention du décrochage scolaire.
Référence
Trempe, S.-C. (2020). Amitié de qualité et risque de décrochage scolaire au secondaire : effet médiateur de la motivation scolaire. Essai présenté comme exigence partielle du Doctorat en psychologie, UQAM, mai. https://archipel.uqam.ca/15912/1/D3875.pdf
Mots clés : décrochage scolaire, amitié, adolescence, études secondaires, motivation
autonome, motivation contrôlée, amotivation, médiation, auto-détermination
[1] Ryan, R.M. et Deci, E.L. (2017). Self-determination theory: basic psychological needs in motivation, development and wellness. New York : Guilford. https://www.erudit.org/fr/revues/rqpsy/2017-v38-n3-rqpsy03258/1041847ar/
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Merci pour cet article. L’influence des amis est effectivement un facteur important en lien avec la persévérance scolaire. En novembre 1995, mon collègue feu Raymond Zayed et moi avions fait un sondage auprès de 1909 élèves de 5e secondaire (1). Sur ces 1909 élèves, 817 avaient déjà pensé à décrocher. 60,8% de ceux-ci disent ne pas avoir décroché grâce à l’influence de leurs amis. Nous avions eu des résultats semblables auprès d’élèves de 3e secondaire en mars 1998 (2). En 3e secondaire, l’influence des amis passait avant celle des parents. Je suis heureux de constater qu’encore aujourd’hui, l’influence des amis est importante. C’est une information utile à savoir pour mieux intervenir.
(1) Terminer les études secondaires, c’est possible. Portrait de l’élève accrocheur. (2) Terminer les études secondaires, c’est possible. Les attentes des élèves de 3e secondaire.