L’apprentissage connecté : des repères en contexte francophone

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Mis à jour le 01 Fév 2022

La pandémie a bouleversé l’école et ses pratiques. Sur quelles stratégies miser pour mieux adapter son enseignement? Comment mieux se rapprocher des élèves? L’article de Bruillard et ses collaborateur·rices (2021) aborde le concept d’apprentissage connecté pour explorer autrement l’expérience d’apprendre, trace les principales opportunités des 20 dernières années qui ont permis d’accroître l’apprentissage connecté dans des écoles du Québec et de la France, puis soulève le défi de la reconnaissance.

Apprentissage connecté

Source de l’image: Shutterstock

L’apprentissage connecté

L’idée d’apprentissage connecté existait bien avant Internet. C’est un apprentissage soutenu par l’interaction avec différentes personnes, en lien ou non avec des établissements. Sans technologie de gestion de la distance (p. ex. courrier, téléphone, visioconférence), l’interaction demeure locale et se limite à l’entourage. Le compagnonnage en est un modèle qui perdure encore aujourd’hui.

L’apprentissage connecté se caractérise aussi par son insistance sur les relations – avec des personnes ou des informations – ainsi que sur leur interdépendance. Plus précisément, l’agentivité, l’interaction et la connexion sont au cœur du concept.

D’abord, tout apprentissage part de l’intérêt d’un individu envers un objet (d’apprentissage). Cet intérêt est autogénéré plutôt que déterminé de l’extérieur, parce qu’il repose sur l’agentivité de la personne, ce qui rejoint la motivation, l’assertivité, la confiance, le style d’apprentissage, etc. Cela dit, apprendre dépend aussi foncièrement de facteurs hétéronomes (p. ex. les pairs, la communauté, la culture environnante), mais aussi du sentiment d’affiliation et de l’engagement que la personne développe.

J’apprends donc dans un groupe que j’influence et qui m’influence à son tour. Ces interactions deviennent un apprentissage connecté dès qu’elles se produisent dans un réseau perméable où les membres se mobilisent et produisent des artéfacts en vue de répondre à un objectif commun tout en se soutenant mutuellement et en profitant d’opportunités (voir figure 1).

Figure 1. L’activité d’apprentissage connecté individuelle

Enfin, la dynamique interactive médiatisée par des ressources viables dans le réseau renforce des connexions qui donnent à la communauté d’apprentissage la cohésion nécessaire à la création d’artéfacts, lesquels témoignent d’une compréhension commune, d’une production collective (voir figure 2). Diverses formes de reconnaissances (diplôme, badges, publications) peuvent d’ailleurs en résulter.

Figure 2. L’activité d’apprentissage connecté d’un réseau ou d’une communauté

Bref, l’apprentissage connecté peut se produire à l’école ou ailleurs tant qu’il inclut : 1) un objectif commun ou un problème partagé; 2) une démarche collective de compréhension ou de production; et 3) une ouverture à l’altérité. Un précédent article du RIRE soulève quelques-unes de ses implications.

L’apprentissage connecté en contexte francophone

L’école en réseau

L’école en réseau (ÉER) enrichit l’environnement d’apprentissage des élèves des écoles participantes par la création de situations authentiques centrées sur des problèmes réels d’intérêt pour les élèves. Elle aide les écoles avec son infrastructure socionumérique, son catalogue partagé d’activités et grâce à l’appui de spécialistes et à la collaboration des membres (élève, personnel enseignant, direction d’école, équipe de recherche-intervention et salle de soutien à distance, conseiller ou conseillère pédagogique, personnel de soutien technique informatique).

Le design de l’ÉER contribue à une culture de l’apprentissage connecté. Ses membres font partie d’un réseau qui s’alimente de leurs contributions afin de répondre à l’objectif commun qui est d’enrichir l’offre éducative en facilitant l’accès au numérique – par l’équipement, le contenu et la qualité d’usage.

Mooc CER

La formation Classes Éloignées en Réseau (Mooc CER) de la plateforme française FUN.MOOC se consacre au modèle de l’ÉER. Elle guide les personnes participantes à faire l’expérience d’une mise en réseau de leur classe. La formation a rejoint deux publics. Vingt-cinq classes (France, Québec, Tunisie) ont d’abord présenté leur école et son environnement aux autres classes participantes, puis ont proposé des énigmes à discuter dans le forum avec les autres classes. Une fois la formation diffusée, les personnes intéressées à comprendre le fonctionnement des classes en réseau (personnel enseignant, formateur et formatrice, parent) traitaient des questions générales de l’apprentissage connecté à l’aide de textes, de vidéos et des traces de participation antérieure des 25 classes.

Au-delà des difficultés autour de l’ergonomie et la convivialité de la plateforme, le Mooc CER a réussi à mobiliser une communauté élargie (parents, élèves, écoles, chercheurs et chercheuses) autour d’activités collaboratives interclasses, à tester à grande échelle un modèle d’apprentissage en réseau et à examiner les opportunités d’un tel réseau (développement professionnel du personnel enseignant, transfert et valorisation du contenu pédagogique).

Durant le confinement de 2020, la réouverture du MOOC CER (hors forum) a rejoint près de 900 personnes à la recherche d’occasions d’échanges, d’idées d’activités ou de ressources à exploiter collectivement afin de dépasser le modèle des cours par correspondance.

J’enseigne à distance

J’enseigne à distance est un ensemble de microprogrammes de formation en accès libre pour s’adapter au passage nécessaire à l’enseignement tout ou partiellement à distance en contexte de pandémie. La formation a déjà délivré plus de 11 636 attestations au niveau préscolaire-primaire.

L’apprentissage connecté soulève un nouveau besoin chez  les apprenant·es , celui d’une forme de reconnaissance, ce qui n’est pas toujours évident hors des contextes scolaires – malgré les multiples possibilités d’apprendre sur le Web. Si ces personnes sont en recherche de reconnaissance, en matière de bénéfices tangibles, les badges peuvent apparaître comme une sorte de monnaie capitalisable dont l’acquisition permet diverses transactions (p. ex. renforcer son statut professionnel).

Conclusion

Les cas examinés d’apprentissage connecté soulèvent l’idée d’une double reconnaissance : l’une interne pour « unifier » localement le réseau et renforcer l’engagement des membres, et l’autre externe pour enrichir le réseau et légitimer ses membres aux yeux d’autrui. Certains réseaux nourrissent cette double reconnaissance en ayant recours à un tiers de confiance, mais cette pratique peut se heurter au « communautarisme » du Web en acceptant sans discernement tout ce qui provient d’une communauté dans laquelle les personnes se sentent proches. À l’évidence, reconnaître les autres en leur attribuant un badge, c’est aussi se faire reconnaître en tant que personne capable d’attribuer des badges.

En somme, l’apprentissage connecté aide entre autres à améliorer l’enseignement formel dans des situations problématiques. Les cas examinés en contexte francophone soulèvent plusieurs aspects de l’apprentissage connecté, dont la collaboration, l’élaboration à partir d’expérience locale et le besoin de reconnaissance des membres tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du réseau.

Référence

Bruillard, É., Ghabara, K., Huguenin, S., Jolicoeur, P.-L., Laferrière, T., Nadeau-Tremblay, S., Papi, C. (2021). L’apprentissage connecté : son évolution en contexte francophone – le cas de l’école (éloignée) en réseau. The Canadian Journal of Learning and Technology, 47(4). https://doi.org/10.21432/cjlt28060

Pour en savoir plus…

L’enseignement supérieur à distance : les défis, les changements et les opportunités pour la nouvelle génération

Susciter l’engagement des élèves en contexte d’apprentissage en ligne

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