La relation enseignante/enseignant-élèves dans l’apprentissage des mathématiques, est-ce important?

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Mis à jour le 09 Mar 2020

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L’apprentissage des mathématiques est lié très fortement au langage formé de symboles qui caractérise cette matière, particulièrement en algèbre. D’ailleurs, la littérature scientifique fait état des difficultés rencontrées par les élèves au primaire et au secondaire à ce sujet; leurs difficultés à comprendre le sens de ces symboles (lettres et signes). L’article des chercheuses Joëlle Vlassis et Isabelle Demonty propose une réflexion sur le rôle de l’enseignante et de l’enseignant dans l’apprentissage des symboles mathématiques. Les chercheures avancent que les interactions entre l’enseignante ou l’enseignant et ses élèves sont nécessaires pour donner un sens culturel aux symboles utilisés en mathématiques et que, pour ce faire, l’enseignante ou l’enseignant doit s’intéresser à la pensée mathématique des élèves.

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Vlassis et Demonty, respectivement de l’Université du Luxembourg et de l’Université de Liège, ouvrent ainsi des pistes de réflexion très riches sur l’étayage et l’accompagnement des élèves en mathématiques. En se basant sur des observations qu’elles ont faites lors de leurs recherches, elles arrivent à dégager un élément vital à l’apprentissage des mathématiques : la richesse des interactions entre l’enseignante ou l’enseignant et ses élèves. Les chercheures souhaitent aussi approfondir une partie des travaux de Luis Radford, professeur à l’Université Laurentienne en Ontario, pour qui les interactions entre l’enseignante ou l’enseignant et les élèves constituent l’une des trois composantes indissociables dans l’apprentissage des mathématiques, avec les objets mathématiques et leurs symbolisations. Vlassis et Demonty explorent donc la manière dont les interactions s’inscrivent dans l’apprentissage des mathématiques.

Les difficultés ressenties par les élèves

Selon les principes donnés par Radford (voir encadré suivant), les symboles sont des outils de communication pour exprimer un objet mathématique. Cependant, certaines pratiques d’enseignement envisagent plutôt ces symboles comme un système de notation qui obéit à des règles et qui vise à appliquer une procédure mathématique.

« Radford (2008) souligne l’ancrage social de l’apprentissage des mathématiques qui, selon lui, ne consiste pas à construire ou (re)construire un élément de savoir, mais plutôt à donner, de manière active et créative, un sens aux objets conceptuels que l’élève trouve dans sa culture. » (Vlassis et Demonty, 2019, p. 102)

Ainsi, les difficultés des élèves en mathématiques (sens de l’égalité, sens des expressions ou de la lettre, du signe moins, etc.) semblent liées aux pratiques d’enseignement où les symboles sont présentés de manière décontextualisée et indépendante des objets ou des opérations qu’ils représentent. Les symboles sont généralement introduits avant les problèmes et les contextes dans lesquels ils entrent en action et cela « conduit souvent [les élèves] à considérer les mathématiques comme la manipulation de symboles vides de sens » (Vlassis et Demonty, 2019, p. 101).

L’importance de la relation

Selon les chercheures, puisque la compréhension des mathématiques est liée à un aspect communicationnel et social, l’étayage pédagogique de l’enseignante ou de l’enseignant (c’est-à-dire le soutien initial qu’elle ou qu’il fournit aux élèves dans l’apprentissage d’une habileté ou d’un concept mathématique) demeure fondamental. Effectivement, d’autres recherches récentes (Lannin, Barker et Townsend, 2006) ont montré que les interactions en classe sont un facteur qui influence les stratégies de résolution de problèmes mathématiques. Parmi celles qui auraient le plus d’impacts : « demander aux élèves d’examiner si leurs généralisations s’appliquent à tous les cas observés et de justifier pourquoi; encourager les élèves à discuter des avantages et des limites de leurs stratégies; et les inviter à établir des relations entre leurs généralisations et des représentations géométriques » (Vlassis et Demonty, 2019, p. 107). Les interactions représenteraient le résultat de l’action de l’enseignante ou de l’enseignant qui identifie les éléments mathématiques signifiants et interprète la compréhension que les élèves en ont.

Toutefois, Vlassis et Demonty soutiennent l’utilité d’approfondir les interactions existantes en ajoutant l’analyse de la pensée mathématique des élèves pour mieux les aider dans leurs blocages vis-à-vis d’un problème mathématique complexe. C’est ce qu’elles appellent le professional noticing. Dans ce type d’interventions, l’enseignante ou l’enseignant encourage les élèves à discuter de stratégies de résolution de problème, les confronte à d’autres stratégies en suscitant des réflexions, etc. Cette approche permet à l’enseignante ou à l’enseignant de voir où en sont ses élèves dans leur compréhension de la matière et d’adapter ses interventions en fonction de la pensée mathématique des élèves.

Conclusion

En se basant sur l’approche de Radford et de Vygotsky, les chercheures se sont interrogées sur l’importance du rôle de l’enseignante et de l’enseignant dans l’apprentissage des mathématiques, surtout de l’algèbre et de la géométrie. Il en ressort notamment qu’en s’intéressant à la pensée mathématique de ses élèves, l’enseignante ou l’enseignant peut les aider à surmonter les obstacles qu’ils rencontrent dans le processus de résolution de problèmes mathématiques.

« Il conviendrait de les intégrer dans un modèle de développement professionnel qui ciblerait en particulier la capacité des enseignants et des enseignantes à développer des interactions efficaces avec les élèves (Ellis, 2011), le tout selon un processus dynamique où alterneraient des moments de réflexions et d’essais dans les classes, ciblés en particulier sur les interactions enseignant/enseignante-élèves. » (Vlassis et Demonty, 2019, p. 116)

Référence

Vlassis, J. et Demonty, I. (2019). Conceptualisation, symbolisation et interactions enseignante/enseignant-élèves dans les apprentissages mathématiques : l’exemple de la généralisation. Éducation et francophonie, VLVII(3), 98-120. https://www.acelf.ca/c/revue/pdf/EF-47-3-098_VLASSIS.pdf

Pour aller plus loin…

 

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