La littérature de jeunesse pour travailler la syntaxe au primaire

Lecture : 3 min.
Mis à jour le 24 Fév 2015

Sujet, prédicat, complément de phrase, phrase de base, phrases transformées, manipulations syntaxiques : voilà des concepts abstraits à première vue, qui sont pourtant au cœur de l’enseignement grammatical prévu dans le programme du primaire.

Est-il possible de les travailler au service de la compétence à écrire des élèves, d’une manière qui soutienne également leur motivation pour l’apprentissage de la littératie?

Source de l’image : Shutterstock jannoon028

Par Pascale Lefrançois, professeure à l’Université de Montréal.

C’est ce que suggère une recherche collaborative dirigée par Pascale Lefrançois, avec la commission scolaire Marie-Victorin, dans le cadre du Programme de recherche sur l’écriture et la lecture (PREL) mis en place par le MELS et le FRQSC.

[Résumé du rapport]

Un dispositif de formation pour les enseignants

Dix-neuf enseignants des six niveaux du primaire ont participé au projet, dont dix pendant les deux années scolaires qu’il a durées. Les enseignants ont vécu sept journées de formation par année, espacées régulièrement de septembre à mai. Ces formations animées par l’équipe de chercheurs et de conseillers pédagogiques visaient l’approfondissement de notions grammaticales, l’exploration de dispositifs pour l’enseignement de l’écriture et la découverte d’œuvres de littérature de jeunesse particulièrement propices à un travail syntaxique. Elles comportaient des ateliers par cycle, des discussions en plénière, avec des moments consacrés à l’échange de bonnes pratiques entre pairs.

Pendant la durée du projet, les enseignants ont déclaré enseigner ou solliciter régulièrement des concepts syntaxiques dans leur enseignement. Lorsqu’ils ont été observés en classe, la plupart d’entre eux ont utilisé la littérature de jeunesse pour travailler la syntaxe. Les pratiques qu’ils ont développées se sont enrichies au fil du temps, révélant une plus grande densité de notions, un étayage plus soutenu auprès des élèves et une autonomie grandissante dans l’utilisation de la littérature de jeunesse. Par ailleurs, leur conception de la phrase s’est améliorée significativement entre le début et la fin du projet.

Les retombées positives de ce dispositif de formation continue suggèrent qu’il est bénéfique de l’étaler sur une longue période et de favoriser des allers-retours entre les moments de formation et les périodes propices à la transposition dans la pratique.

Des apprentissages chez les élèves

Des apprentissages significatifs ont également été observés chez les élèves des enseignants participants (494 au total), garçons comme filles. Leur conception de la phrase s’est améliorée entre le début et la fin de l’année scolaire, surtout leur capacité à justifier pourquoi ils jugent qu’un énoncé est ou non une phrase. Sur cette même période, leurs erreurs de syntaxe en production écrite ont diminué.

Leur rapport à l’écrit est resté constant, ce qui constitue un résultat positif, puisqu’il se détériore habituellement avec le temps. Enfin, meilleure est la conception de la phrase chez les élèves, moins les textes qu’ils produisent comportent d’erreurs syntaxiques et plus ils sont riches syntaxiquement.

Des pratiques gagnantes ?

Y a-t-il des pratiques plus recommandables que d’autres pour faire en sorte que les élèves améliorent leurs connaissances sur la phrase et les aspects syntaxiques de leur compétence à écrire? La recherche n’a pas permis d’en identifier.

Ce serait l’expertise accrue de l’enseignant en matière d’enseignement de la grammaire qui lui permettrait d’intervenir de manière appropriée auprès de ses élèves, d’adopter une pratique réputée porteuse et de l’adapter aux besoins de sa classe.

Conclusion

Cette recherche montre qu’il est possible d’enseigner la syntaxe à tous les cycles du primaire, quand les pratiques sont adaptées aux élèves. Elle montre également que d’appuyer l’enseignement de la langue sur des textes authentiques, comme les livres de littérature de jeunesse, est à la fois un gage de motivation chez les élèves et un moyen de les faire progresser en matière de connaissances grammaticales et de compétence à écrire.

[Consulter le rapport]

Articles similaires

Wikipédia : le type de contribution comme gage de qualité

Le style de collaboration à la rédaction d’articles sur Wikipédia a un effet direct sur la qualité de ceux-ci.

Voir l’article

Wikipédia dans la classe

L’encyclopédie libre Wikipédia fait partie des outils pouvant avoir une visée pédagogique.

Voir l’article

La voie de la réussite, la voix des étudiants

Les attitudes et les comportements scolaires sur lesquels s’appuient ces deux grands concepts sont nommés par les étudiants eux-mêmes.

Voir l’article

Commentaires et évaluations

Contribuez à l’appréciation collective

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

  • « Nous écrivons actuellement un livre à propos de notre recherche dans lequel il y aura plusieurs oeuvres ciblées pour aborder différents contenus syntaxiques avec les élèves des différents cycles du primaire. »
    Est-ce disponible?

    Nadine
    • Bonjour,

      Je vous invite à écrire directement à Madame Lefrançois pour plus de détails : pascale.lefrancois@umontreal.ca

      Bonne poursuite dans vos démarches!
      Bruno Hubert, chargé de la veille et du RIRE

      Bruno Hubert
  • Bonjour,

    J’ai entendu parler de votre recherche sur l’enseignement de la syntaxe par la littérature jeunesse et ce projet m’intéresse vivement. Auriez-vous par hasard dressé une liste d’ouvrages qui s’y prêtes ?

    Merci infiniment !

    Julie Massicotte (une ancienne enseignante de la comm. scolaire Marie-Victorin)

    Julie Massicotte
    • « Bonjour Madame Massicotte,
      Je vous suggère de lire le réseau relatif à Hans Christian Andersen publié dans le Pollen 10, il y a un travail syntaxique proposé aux élèves du 1er cycle relatif à l¹enrichissement de phrases.
      Par ailleurs, vous trouverez en suivant ce lien http://diffusion-didactique.scedu.umontreal.ca/docs/25.pdf un document fourni aux participants d¹un atelier que nous avons offert Pascale Lefrançois et moi lors du congrès de l¹AQEP. On y trouve quelques références d’oeuvres et des narrations de pratiques d’enseignement.
      Nous écrivons actuellement un livre à propos de notre recherche dans lequel il y aura plusieurs oeuvres ciblées pour aborder différents contenus syntaxiques avec les élèves des différents cycles du primaire.
      J¹espère que ces quelques éléments vous seront utiles.
      Cordialement,
      Isabelle Montésinos-Gelet »

      Bruno Hubert
  • Il est évidemment possible d’enseigner la syntaxe à tous les cycles du primaire, quand les interventions sont adaptées aux élèves : cette recherche, à cet égard, ne « découvre » rien de nouveau.

    Cela inclut l’enseignement explicite et l’induction habilitante du plaisir de comprendre lié à l’effort soutenu.

    Les textes authentiques peuvent être les livres de littérature de jeunesse, mais également les productions des élèves.

    La régularité de la pratique de l’analyse syntaxique réflexive est un gage de motivation chez les élèves qui, plus ils comprennent plus ils désirent comprendre.

    Il est vrai que c’est un moyen de faire progresser les écoliers en matière de connaissances grammaticales et de compétence à écrire et, plus encore, c’est un moyen primordial.

    Il est dès lors étonnant que la formation initiale de tous les enseignants ne leur donne pas le bagage suffisant pour piloter efficacement l’enseignement requis.

    Il fut pourtant un temps où cela se faisait d’autant plus aisément que la pratique était instaurée tout au long de la scolarité.

    Il est donc heureux que la recherche retrouve les savoirs du passé, en demeurant prudente dans sa tendance à les mettre au goût du jour, au risque toujours présent, de les diluer.

    Patrick Daganaud