Un modèle d’intervention pour contrer la cyberintimidation
« Je trouve qu’on n’est pas très outillés, pas beaucoup au courant de ce qu’on peut faire, de comment on peut s’y prendre », a exprimé un enseignant interrogé sur ses habiletés à intervenir efficacement face à des comportements de cyberintimidation chez ses élèves dans le cadre d’une étude.
Comment peut-on aider les enseignants à composer avec cette forme de violence complexe et lourde de conséquences? Pour répondre au besoin de pistes d’intervention du milieu scolaire, les chercheuses Émilie Myriam Roy et Claire Beaumont de l’Université Laval ont proposé un modèle d’intervention pour combattre la cyberintimidation à l’école.
par Émilie M. Roy, enseignante et coauteur du modèle PESS
Le modèle d’intervention PESS (Prévention-Éducation-Sanctions-Suivi) vise à combattre la cyberintimidation. Ce modèle combinant la théorie et la pratique considère à la fois la gravité des gestes posés et l’ajustement des comportements suite aux premières interventions.
1. Prévention pour tous
Tout d’abord, le meilleur moyen de combattre la cyberintimidation est d’en faire la prévention auprès des jeunes en leur enseignant à se comporter d’une manière appropriée en ligne. En plus d’apprendre à limiter les informations personnelles qu’ils divulguent sur Internet, les enfants doivent :
- apprendre à respecter les différences;
- éviter de faire des commentaires dénigrants ou de republier des contenus pouvant humilier ou menacer certaines personnes;
- être informés des conséquences civiles et légales des gestes visant à faire du tort;
- apprendre à composer, de manière adéquate, avec des situations de conflits pouvant survenir en ligne.
Le milieu scolaire peut faire de la prévention auprès des élèves à travers une variété d’activités de sensibilisation comme par exemple, en tenant des discussions ouvertes, par des études de cas, des jeux de rôles, ou encore par la création d’affiches informatives.
2. Éducation et rééducation
À l’étape 2 du modèle, puisqu’il s’agit de réagir à une première offense, des interventions éducatives plutôt que punitives sont proposées. Dans le cas d’une agression mineure, l’enseignant ou un autre intervenant pourrait simplement rencontrer l’élève ayant commis les agressions, ainsi que ses parents, pour signaler le comportement à éliminer. Dans le cas d’une agression modérée ou sérieuse, un plan d’intervention ciblant les besoins éducatifs de l’élève agresseur pourrait être mis en place.
3. Sanction/Conséquences
À l’étape trois, il s’agit d’intervenir face à des comportements de cyberinimidation qui persistent malgré une première intervention. Peu importe la gravité du geste, il est important d’impliquer activement l’élève dans la réparation des torts causés à la victime, comme par exemple en l’incitant à présenter des excuses par écrit à la victime et à établir un plan pour redresser la réputation de celle-ci.
Dans le cas de la récidive de comportements de gravité modérée ou sérieuse, une suspension (interne ou externe) avec activités de réflexion et tâches de type travaux communautaires peuvent également s’appliquer. Le signalement des comportements à la Police s’avère aussi nécessaire dans le cas d’harcèlement ou de menaces à la sécurité.
4. Suivi
La quatrième étape s’applique obligatoirement s’il y a eu cyberintimidation, peu importe si l’étape trois a été nécessaire ou non, puisqu’il s’agit de faire le suivi des comportements de l’élève suite aux interventions effectuées.
Dans le cas, par exemple, d’agressions mineures et de première offense, il peut suffire de vérifier auprès de la victime si les comportements d’agression ont cessé ou si d’autres interventions sont nécessaires. Dans le cas d’agressions plus graves ou de récidive, des rencontres de suivi du plan d’intervention peuvent s’ajouter au suivi effectué auprès de la victime.
Conclusion
En conclusion, le modèle d’intervention PESS propose des pistes d’intervention pour aider les intervenants du milieu scolaire à combattre la cyberintimidation. Il est toutefois primordial que les parents des élèves concernés soient impliqués dans le processus d’intervention, car les agressions sont souvent faites à partir de la maison et à travers l’utilisation d’outils informatiques mis à la disposition des jeunes par les parents. Les parents ont donc la responsabilité de superviser l’utilisation des technologies à la maison et c’est à eux d’imposer des restrictions si cela s’avère nécessaire.
[Consulter le rapport SÉVEQ]
RÉFÉRENCES
Hinduja, S., & Patchin, J. W. (2009) Bullying Beyond the Schoolyard. Thousand Oakes, CA: Corwin Press.
Roy, É. M., & Beaumont, C. (2013) L’intervention en contexte de cyberintimidation: les pratiques des enseignants. Enfance en difficulté, 2, 85-109.
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