Le roman historique, une porte d’entrée vers une citoyenneté sensible et critique

Source de l’image : Bélanger (2022, p.166) ©

Un chemin lectoral interdisciplinaire à aplanir, et surtout à explorer

Le roman historique a acquis le droit de cité à l’école par l’intérêt populaire qu’il suscite et la notoriété des auteurs qui ont étayé ce genre littéraire ici, comme ailleurs. En plus d’offrir une échappatoire au réel, il peut constituer une manière d’explorer la nature humaine, parfois même sous ses formes extrêmes (ex. génocide), et s’avérer une expérience pouvant aider les élèves à penser le monde avec et par les disciplines, en l’occurrence celles du français et de l’histoire. Dans cette perspective, il peut devenir un objet de médiation pour discuter avec eux de thèmes difficiles comme l’histoire de l’Holocauste. L’œuvre littéraire peut ainsi être le point de départ à un travail d’enquête historico-littéraire susceptible de favoriser une rencontre entre (res)sentis, réflexions critiques et réflexivité. Or, en dépit de ses potentialités (trans)formatrices, la découverte et l’analyse critique d’un roman historique sont encore confrontées à un certain nombre d’obstacles, dont le cloisonnement disciplinaire, le manque de temps, de ressources ou de formation.

C’est en ayant en tête le but d’aplanir ces obstacles que Bélanger (2022), encadrée par une équipe interdisciplinaire, a conçu, puis mis au point un chemin lectoral français/histoire. Ce dernier, ancré dans la réalité du terrain, se veut un outil facilitateur flexible et adaptable. Il vise à aider les enseignants à élaborer une situation d’apprentissage articulant les actes de lire et de dire spécifiques aux disciplines convoquées, la lecture littéraire (LL) (Dufays et al., 2015) et la pensée historienne (PH) (Seixas et Morton, 2013).

Le roman historique, un genre propice à (r)éveiller le désir d’enquêtes des élèves

Les chemins experts qu’offrent les disciplines français et histoire pourraient aider les élèves à explorer plus attentivement une œuvre littéraire et ce qu’elle sous-tend. En ouvrant à deux chemins lectoraux complémentaires (LL et PH), le roman historique offre un terreau propice à un travail d’enquête historico-littéraire. Ce travail a été conçu de manière à mobiliser connexion affective, contextualisation et multiples perspectives (Endacott et Brooks, 2018) dans un ensemble équilibré et intersubjectif. Il peut mener une communauté de jeunes enquêteurs à problématiser la fiction afin d’accéder à travers elle à une plus grande histoire. À l’école, un tel travail peut connaître une portée extratextuelle, car l’œuvre, par sa forme particulière de pensée, donne à (res)sentir, à réfléchir, à choisir.

Source de l’image : Bélanger (2022, p.170) ©

Ainsi, la lecture littéraire et historienne peut s’avérer une manière d’animer l’objet « livre » afin qu’il devienne une porte d’entrée vers une citoyenneté sensible et critique. En ce sens, le roman historique peut constituer le point de départ à une expérience qui éclaire divers chemins possibles et légitimes de la vie.

Il peut permettre d’engager un processus empathique et réflexif favorable au vivre-ensemble au moyen de différentes clés de lecture. Toutefois, pour donner une telle portée à la lecture, il importe encore de percer certaines cloisons, et de s’accorder le temps et les moyens d’une collaboration interprofessionnelle pour mener une exploration potentiellement (trans)formatrice.

Références :

Bélanger, A. (2022). La lecture littéraire et la pensée historienne dans une dynamique intégrative : recherche design en éducation autour d’un roman historique évoquant l’Holocauste. [thèse de doctorat]. Université de Sherbrooke.

Dufays, J.-L., Gemenne, L. et Ledur, D. (2015). Pour une lecture littéraire. Histoire, théories, pistes pour la classe (3^e éd.). De Boeck supérieur. (Ouvrage original publié en 1996)

Seixas, P. et Morton, T. (2013). Les six concepts de la pensée historique. Modulo.