La réussite éducative des élèves en formation professionnelle et ses liens avec la compétence émotionnelle

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Mis à jour le 06 Nov 2024

La Politique de la réussite éducative du Québec vise à soutenir les élèves dans le développement de leur plein potentiel et à former des personnes qui accompliront leur rôle citoyen de manière responsable au sein de la société (MEES, 2017). Pour ce faire, l’école québécoise a la responsabilité de remplir trois missions : instruire (développement intellectuel et acquisition de connaissances), qualifier (acquisition de compétences permettant l’intégration socioprofessionnelle) et socialiser (apprentissage du vivre-ensemble et développement d’un sentiment d’appartenance à la collectivité). 

Contexte particulier de la formation professionnelle 

Alors que la formation secondaire générale dispose de cinq ans pour soutenir ses élèves dans l’atteinte de leur plein potentiel, la formation professionnelle de niveau secondaire n’a que quelques mois pour atteindre ce même objectif. En effet, les centres de formation professionnelle offrent des programmes de courte durée, allant de quelques mois à deux ans, ce qui favorise une diplomation rapide et une entrée accélérée sur le marché de l’emploi.  

En priorisant un objectif de maîtrise de compétences en cohérence avec le marché du travail, le cursus en formation professionnelle place l’accent sur la qualification des élèves. Les données du ministère de l’Éducation (2020) exposent toutefois le fait qu’un élève en formation professionnelle sur cinq n’obtient pas son diplôme. Il est alors pertinent de mieux comprendre les facteurs associés à la réussite des élèves, en considérant non seulement la qualification des élèves, mais aussi leur instruction et leur socialisation.  

Compétence émotionnelle et réussite éducative 

La compétence émotionnelle est un ensemble d’habiletés qui permet d’identifier, de comprendre, d’exprimer, de réguler et d’utiliser ses émotions, et les émotions d’autrui, pour favoriser l’atteinte de ses objectifs de vie (Mikolajczak et al., 2009). Une personne avec une forte compétence émotionnelle peut adapter son comportement en fonction des émotions qu’elle perçoit dans une situation précise. Bien que le lien entre la compétence émotionnelle et la réussite éducative ait déjà été exploré (Voyer et Véronneau, sous presse), notre étude propose de revisiter cette question en proposant une version améliorée du « Questionnaire de réussite éducative en formation professionnelle » (QRÉ-FP, Tsakpinoglou et Véronneau, 2023), une mesure en trois sous-échelles (instruire, qualifier et socialiser) qui correspondent aux trois missions de l’école québécoise.  

En mesurant la compétence émotionnelle avec l’outil de Brasseur et al. (2013), nos analyses ont révélé que la sous-échelle « instruire » est corrélée avec la compétence émotionnelle. Cela dit, c’est la sous-échelle « socialiser » qui est la plus fortement corrélée avec la compétence émotionnelle. La sous-échelle « qualifier », pour sa part, n’est pas liée à la compétence émotionnelle. Ainsi, le fait de mettre l’accent sur la qualification des élèves en formation professionnelle ne semble pas contribuer à développer leur compétence émotionnelle durant leurs études. Dans le cadre de futures recherches, le QRÉ-FP (Tsakpinoglou et Véronneau, 2023) pourrait permettre de documenter comment une amélioration des pratiques enseignantes visant à promouvoir la compétence émotionnelle des élèves favorise la socialisation des élèves. 

Fournir un effort conscient pour agir sur la compétence émotionnelle 

Les aptitudes de compétence émotionnelle se développent et s’affinent au fur et à mesure qu’un individu interagit avec les autres. Puisque les élèves en formation professionnelle entrent constamment en relation avec des personnes provenant de divers milieux (p. ex., personnel enseignant, autres élèves, superviseur ou superviseure de stage, employeur ou employeuse, etc.), le fait d’avoir une bonne compétence émotionnelle pourrait les aider à maintenir de bonnes relations interpersonnelles, de faire leur place dans leur milieu d’études et de travail, et de se sentir membres à part entière de leur communauté. Ainsi, il serait pertinent d’intégrer le développement de la compétence émotionnelle de manière transversale tout au long du cursus des élèves. La mise en place de programmes ciblant le développement d’habiletés socioémotionnelles pour les élèves qui présentent des difficultés particulières dans ce domaine pourrait aussi être une avenue intéressante. 

Références 

Brasseur, S., Grégoire, J., Bourdu, R., & Mikolajczak, M. (2013). The profile of emotional competence (PEC): Development and validation of a self-reported measure that fits dimensions of emotional competence theory. PloS one, 8(5), e62635. doi:10.1371/journal.pone.0062635 

Mikolajczak, M., Quoidbach, J., Kotsou, I. et Nelis, D. (2009). Les compétences émotionnelles. Dunod. 

Ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur (MEES). (2017). Politique de la réussite éducative : le plaisir d’apprendre, la chance de réussir. http://www.education.gouv.qc.ca/fileadmin/site_web/documents/PSG/politiques_orientations/politique_reussite_educative_10juillet_F_1.pdf  

Ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur (MEES) (2020). Indicateurs de l’éducation en formation professionnelle. Gouvernement du Québec. Direction des indicateurs et des statistiques. 

Tsakpinoglou, F., et Véronneau, M.-H. (2023). La réussite éducative en formation professionnelle : validation d’un premier questionnaire. Canadian Journal of Education / Revue canadienne de l’éducation, 45(4), 893–919. https://doi.org/10.53967/cje-rce.5247 

Voyer, S. et Véronneau, M.-H. (sous presse). Le bien-être psychologique des élèves de formation professionnelle lors de leur transition en emploi : Le rôle de la compétence émotionnelle et de la réussite éducative. Revue des sciences de l’éducation de McGill. 

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