Les fonctions exécutives chez les enfants d’âge préscolaire
Dans un article paru sur le blogue Parlons Apprentissage, Stéphanie Duval, professeure en science de l’éducation à l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC), explique ce que sont les fonctions exécutives et comment soutenir leur développement en contexte scolaire. Cette infographie est une adaptation des propos tenus par cette spécialiste des fonctions exécutives à l’âge préscolaire.
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Honnêtement parler de fonctions exécutives est une compétence nouvelle pour moi, elle m’aidera certainement à mieux conquérir cette nouvelle filière .
Mille remerciements, plus de rayonnements et de succès !
El yaagioubi ahmed
Bonjour Mme Levac,
Je suis heureuse que vous ayez pris le temps d’écrire ce commentaire.
En fait, lorsque j’évoque que « les fonctions exécutives ne s’enseignent pas », il est ici question d’enseignement systématique de telles fonctions cognitives. Par exemple, j’estime qu’on ne peut pas enseigner la mémoire de travail (MdT) à un enfant; on peut par contre l’accompagner afin qu’il développe des stratégies permettant de favoriser ses habiletés liées à la MdT.
Comme vous le savez sans doute, le programme d’éducation préscolaire préconise l’apprentissage par le jeu afin que l’enfant développe chacune des dimensions de son développement global. En ce qui concerne les fonctions exécutives, je suis d’avis que cette approche permet à l’enfant d’explorer le monde qui l’entoure, en étant soutenu par l’adulte, notamment par l’étayage dans le cadre du jeu. Ainsi, il n’est pas question « d’enseigner » à tout le groupe des fonctions exécutives sur une base régulière (p.ex. faire des activités « Jean dit » tous les matins), mais plutôt d’accompagner chaque enfant afin qu’il puisse développer des stratégies, habiletés, aptitudes et compétences y étant liées, en tenant compte des besoins et des défis de chacun.
Comme vous le dites si bien, certains enfants ont des besoins plus grands que d’autres; vous mentionnez que « des enfants ayant un TDA ou ceux dont le milieu de vie naturelle ne s’avère pas suffisamment stimulant, il est essentiel d’enrichir leur répertoire de référence et d’enseigner des stratégies pour développer ces clés de leur développement ». Je suis d’accord. Or, la vraie question est « comment » soutenir ces enfants afin qu’ils développent ce répertoire de stratégies?
La qualité de l’environnement éducatif, notamment la qualité des interactions en classe, s’avère une piste prometteuse afin d’accompagner les enfants à l’éducation préscolaire dans le développement de ces fonctions. En effet, il est reconnu que la qualité des interactions en classe constitue l’élément-clé de la qualité de l’environnement, laquelle est associée à la réussite éducative de l’enfant. Cette qualité des interactions est mesurée selon 3 domaines : le soutien émotionnel, l’organisation de la classe et le soutien à l’apprentissage (Pianta et al., 2008). Parmi le soutien à l’apprentissage se trouvent les dimensions « développement de concepts » (p.ex. questionner l’enfant afin qu’il puisse affiner son raisonnement, l’amener à créer, à faire des prédictions, tisser des liens entre les concepts et la vie réelle de l’enfant, etc.), la qualité de la rétroaction (p.ex. l’étayage fait par l’adulte, les indices fournis par celui-ci, etc.) et le modelage langagier (p.ex. utilisation de questions ouvertes, répétitions/extensions, utilisation de vocabulaire élaboré, etc.). Bref, j’estime que la qualité des interactions vécues entre l’enseignante et l’enfant est un facteur à considérer dans l’étude des fonctions exécutives.
En tenant compte de la zone proximale de développement, l’enseignant est en mesure de concevoir des situations riches et adaptées aux besoins des enfants âgés de 5 ans, lui permettant ainsi d’intervenir de manière intentionnelle envers chacun, selon ses propres capacités. Selon moi, il s’avère plus complexe de mettre en place un milieu éducatif de qualité où l’enseignant accompagne chaque enfant dans le développement de stratégies liées aux fonctions exécutives, notamment par le questionnement et le développement de concepts, que d’enseigner systématiquement « des fonctions exécutives » en grand groupe. Somme toute, je crois que nos visions se rejoignent!
En raison de l’importance des fonctions exécutives, un des facteurs clés dans le développement de la personne, il me semble nécessaire de déboulonner un mythe. Les fonctions exécutives peuvent s’enseigner. Non seulement elles le peuvent, mais elles doivent l’être pour plusieurs, même auprès de jeunes enfants.
Il est vrai qu’il faut accorder une place importante aux jeux libres, et aux autres formes de jeux, pour favoriser le développement de l’enfant d’âge préscolaire. Il est essentiel d’accorder quotidiennement du temps au jeu et que ce temps ne doit pas être négligé.
Il est vrai aussi que l’environnement physique et le contexte dans lequel évolue l’enfant influencent naturellement le développement des fonctions exécutives de plusieurs.
Cependant, en présence d’enfants ayant des difficultés d’apprentissage, des enfants ayant un TDA ou ceux dont le milieu de vie naturelle ne s’avère pas suffisamment stimulant, il est essentiel d’enrichir leur répertoire de référence et d’enseigner des stratégies pour développer ces clés de leur développement.
Il est faux de prétendre que tout s’apprend naturellement et spontanément.
Minimalement dans les cas où des vulnérabilités ou des difficultés sont constatées, l’enseignement de stratégies nécessaires au développement des fonctions exécutives peut être nécessaire, même chez les plus petits (individuellement, en petit ou en grand groupe selon l’âge).
Posez la question à n’importe quel adulte ayant appris sur le tard qu’il « a » un TDA, avec ou sans H, ou qu’il souffre d’un TSA :
– L’enseignement de stratégies leur aurait-il été utile plus tôt dans leur vie?
– Auraient-ils bénéficié d’un enseignement de stratégies pour améliorer leur mémoire de travail, leur capacité à s’organiser et à planifier?
– Auraient-ils bénéficié d’un enseignement de stratégies relatives à l’inhibition nécessaire au contrôle de l’impulsivité, à la gestion de l’attention, à l’apprentissage de la concentration et au développement d’habiletés sociales?
Posez la question aux enfants et adolescents suivis pour ces troubles et difficultés, à qui ces stratégies et autres moyens sont enseignés à différents moments de leur parcours:
– Ces apprentissages auraient-ils pu se faire aussi facilement, au bon moment et aussi efficacement sans interventions ou enseignement ?
– Auraient-ils profité de ces apprentissages s’ils leur avaient été accessibles plus tôt?
Le dépistage, la prévention et l’intervention précoce, ça ne devrait pas nous dire quelque chose?
L’apprentissage de stratégies métacognitives qui permet déjà à des enfants de 5 ans d’expliquer leur démarche et leurs apprentissages, comme le prévoit le programme de préscolaire québécois, sollicite la mémoire de l’enfant, sa capacité de planification/organisation et d’inhibition pour choisir et organiser les idées dans son discours. N’est-il pas souhaitable que le développement de cette compétence du programme soit enseigné, modélisé, pour démontrer clairement à l’enfant ce qu’il est invité à développer comme habileté?
L’étayage et la modélisation font partie de stratégies d’enseignement, même au préscolaire. La planification des interventions dans le but de favoriser le développement des enfants et les amener au-delà de leur zone proximale de développement peut sûrement se faire naturellement et spontanément chez certains enfants placés dans les bons contextes, mais cette planification prévoit souvent l’observation des élèves et les interventions qui permettra à certains d’obtenir le coup de pouce dont ils ont besoin. Car il demeure que l’intervention de l’adulte, l’enseignement d’habiletés, d’attitudes, de stratégies, de connaissances, c’est essentiel souvent et pour plusieurs.
– Nommer ces apprentissages.
– En tenant compte des besoins, des apprentissages antérieurs réalisés et des capacités des enfants:
* leur offrir des occasions de pratiquer en contextes naturels ou organisés/planifiés;
* leur offrir des occasions de répéter afin de favoriser l’automatisation de nouvelles habiletés, de nouveaux savoir-être et savoir-faire.
Cet agir professionnel de l’enseignant du préscolaire doit être reconnu. Tout comme la place essentielle qu’il doit accorder au jeu dans la journée avec ses élèves, son rôle d’enseignement doit être revaloriser comme facteur nécessaire, même essentiel, au développement des fonctions exécutives et au développement global des enfants d’âge préscolaire dont il a la responsabilité.