TIC et intégration socio-professionnelle : une utopie?

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Mis à jour le 02 Juin 2015

Apport de l’ergonomie à la conception de situations d’apprentissage en milieu de travail

Les élèves inscrits au Parcours de formation axée sur l’emploi, dans le volet « Préparation au marché du travail » doivent compléter 900 heures de stages d’insertion socioprofessionnelle au cours de leurs trois années de formation (classe atelier et éventuellement, milieu de travail véritable).

Les tâches que peuvent apprendre ces élèves sont variées; elles sont tirées du Répertoire des métiers semi-spécialisés du ministère de l’Éducation (ex : préparation alimentaire, emballage, assemblage, manutention).

Source de l’image : Shutterstock Ross Petukhov

par Marie Laberge, Ph.D., Université de Montréal

L’insertion professionnelle en milieu de travail pose de nombreux défis en termes d’apprentissage et d’encadrement. L’une des principales difficultés rencontrées concerne la faible autonomie professionnelle des élèves et la nécessité d’un encadrement de proximité très soutenu. En effet, certains élèves demandent une supervision constante de la part des personnes en charge de les accueillir et de les former. Pour cette raison, plusieurs jeunes perdent leur milieu de stage, ce qui les met en échec dans leur formation.

Qu’est-ce que l’ergonomie?

L’ergonomie est la discipline scientifique qui s’intéresse à l’interaction entre l’humain et d’autres éléments d’un système, comme le système « environnement de travail », dans le but d’optimiser le bien-être de l’humain et la performance globale du système.

Un projet de recherche-action

Ce projet de nature exploratoire a été réalisé à la Commission scolaire Vallée-des-Tisserands, en collaboration avec une équipe de recherche en ergonomie dirigée par Marie Laberge (chercheuse au Centre de recherche du CHU Ste-Justine et au CINBIOSE).

La recherche-action visait globalement l’amélioration de la réussite d’élèves présentant une déficience intellectuelle légère ou autres troubles associés dans leur démarche d’insertion professionnelle, par le recours aux aides technologiques.  Elle se destinait au départ à concevoir des séquences de tâches à l’aide d’assistants numériques à la réalisation de tâches, tels que MARTI, afin de rendre les élèves plus autonomes dans l’apprentissage de routines simples au travail.

Le projet a ensuite été modulé, en raison des difficultés de réalisation du projet initial, en transformant l’aide pédagogique en ressource métacognitive. Ainsi, les séquences de tâches ont davantage été utilisées pour stimuler une réflexion sur l’action, plutôt que comme des aides cognitives au rappel des tâches en cours d’action.

Quelques obstacles

La collaboration avec des ergonomes a permis d’identifier plusieurs obstacles à la mobilisation des technologies de l’information et des communications (TIC) en milieu de travail, notamment les difficultés :

    • techniques (ex : accessibilité réseau Wi-Fi);
    • organisationnelles (acceptabilité sociale de l’aide technologique en milieu de travail);
    • opératoires intrinsèques (comment utiliser un baladeur numérique lorsque les tâches de travail sollicitent constamment les deux mains?).

À ce sujet, les ergonomes ont rappelé qu’en milieu de travail, pour qu’une ressource soit mobilisée, elle se doit d’être « opératoire », c’est-à-dire utile et utilisable au moment de l’action.

En matière de développement des ressources pédagogiques et technologiques, ces constats sont tout à fait cohérents avec l’approche des fonctions d’aide valorisée par le RÉCIT national en adaptation scolaire.

Conclusion

Ce projet a permis de constater que les éducateurs et les ergonomes développent des modèles de compréhension qui ont beaucoup de points en commun, notamment les modèles d’apprentissage basés sur des approches écosystémiques et socio-constructivistes, centrées sur la mobilisation des ressources en situation et sur le développement des capabilités (capacités réellement accessibles aux individus en fonction du contexte de la situation).

Ces rapprochements se manifestent concrètement avec l’émergence de l’ergonomie constructive et de la didactique professionnelle, domaines qui visent le développement des personnes et des organisations en utilisant le potentiel de l’analyse ergonomique de l’activité de travail. Ces constats ouvrent la voie à de nouvelles collaborations entre éducateurs et ergonomes dans le but de favoriser le développement professionnel des élèves handicapés ou en difficulté d’apprentissage ou d’adaptation.

Pour de plus amples renseignements : marie.laberge@umontreal.ca.

Ce projet contribue à une programmation de recherche soutenue par le ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MEESR)  (mesure 30054) et par Centre de recherche sur les politiques en matière d’invalidité professionnelle (CRPIP) (bourse du Conseil de recherches en sciencs humaines # 895-2012-1017).

Références

  • Chatigny, C. (2001). « Les ressources de l’environnement : au cœur de la construction des savoirs professionnels en situation de travail et de la protection de la santé ». Revue électronique PISTES, vol. 3, no. 2. http://pistes.revues.org/3719.
  • Falzon, P. (2013). Ergonomie Constructive. Paris : Presses universitaires de France, 249 p.
  • Rogalski, J. (2004). « La didactique professionnelle : une alternative aux approches de ‘cognition située’ et ‘cognitiviste’ en psychologie des acquisitions ». Activités, 1 (2), 103-120. http://www.activites.org/v1n2/Rogalski.pdf.
  • Sen, A. (2004). « Capability and well-being », in Nussbaum, Martha; Sen, Amartya, The quality of life, New York: Routledge, pp. 30–53.

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