Causes de l’épuisement professionnel chez les enseignants et conséquences pour les élèves

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Mis à jour le 03 Juin 2019

L’épuisement professionnel est parfois défini comme la phase finale d’un processus de fatigue physique, mentale et émotionnelle chronique. On le décrit aussi comme un processus progressif d’érosion des moyens internes d’un travailleur. En ce qui concerne les enseignants, on peut percevoir cet épuisement, entre autres, comme une usure muette et continue, qui résulte du contact fréquent avec les élèves. Les trois manifestations de l’épuisement professionnel sont la fatigue physique, mentale et émotionnelle (ou fatigue professionnelle), le développement d’une image de soi inadéquate (ou sentiment de non-accomplissement ou d’inefficacité au travail) ainsi que la prise de distance avec autrui due à des sentiments négatifs et cyniques (aussi appelée dépersonnalisation).

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par Patrice Cyrille Ahehehinnou

Généralement et dépendamment du contexte, les études menées sur le phénomène associent divers facteurs à l’épuisement professionnel chez les enseignants. On peut regrouper ces facteurs en trois catégories :

  1. Les variables biographiques (sexe, âge, état civil, ordre d’enseignement, expérience dans l’enseignement, etc.);
  2. Les variables organisationnelles (problèmes avec les apprenants [indiscipline] et avec l’administration, conflits et ambiguïté de rôle, surcharge de travail, manque de soutien social, etc.);
  3. Les caractéristiques de la personnalité (style d’enseignement, type de personnalité, faible actualisation de soi, faible satisfaction professionnelle, faible estime de soi, faible sentiment d’efficacité personnelle [aussi appelé auto-efficacité], manque de compétences professionnelles, etc.).

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L’épuisement professionnel des enseignants a des répercussions non seulement sur leur propre vie, mais aussi sur la vie des élèves. Ces répercussions se manifestent sur le plan physique, psychologique, comportemental et même attitudinal. Les principales conséquences négatives sur la vie des enseignants sont :

  • une diminution de la motivation et de la satisfaction au travail;
  • une baisse de la performance au travail;
  • une émergence de sentiments de culpabilité et de frustration dus à l’incapacité de se donner autant qu’avant pour les élèves;
  • une perception négative de soi-même et de son enseignement;
  • une détérioration des attitudes et des pratiques associées à un bon enseignement : baisse de l’enthousiasme, de la sensibilité et du soutien accordé aux élèves, de la qualité de la relation maître-élève, de l’efficacité dans la gestion des comportements et des apprentissages ainsi que de la qualité de l’enseignement.

Ces répercussions sur le travail des enseignants sont parfois associées négativement au bien-être et à la réussite scolaire des élèves. En effet, une diminution de l’efficacité professionnelle des enseignants est directement liée à une diminution du bien-être et des performances scolaires des élèves au primaire. Le degré de fatigue professionnelle chez les enseignants est donc aussi lié à la réussite scolaire des élèves. Au secondaire, par exemple, l’absence de fatigue professionnelle chez les enseignants contribue à un bien-être optimal chez leurs élèves.

Par ailleurs, les résultats de l’étude réalisée par le professeur Michel Janosz et ses collaborateurs (2017) laissent croire qu’à un certain niveau de fatigue des enseignants, le bien-être et la réussite des élèves sont optimaux. L’hypothèse émise par ces chercheurs pour expliquer ces résultats est la suivante : des niveaux  élevés de fatigue professionnelle reflètent un engagement au travail important, ce qui expliquerait la forme de ces effets.

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L’épuisement professionnel chez les enseignants peut, en outre, conduire à des conséquences très lourdes, par exemple de graves problèmes de santé comme la dépression chronique. Il peut aussi entraîner des absences répétées de la part des enseignants, ou ce qui est bien pire : favoriser leur décrochage. Il est donc important que tous les acteurs scolaires, y compris les directions d’écoles, et les enseignants en particulier, agissent tôt pour pallier toute situation d’épuisement professionnel.

[Dossier thématique : Les défis professionnels des enseignants québécois]

 

Références

Janosz, M., Marchand, A., Pagani, L. S., Archambault, I. et Chouinard, R. (2017). Déterminants et conséquences de l’épuisement professionnel dans les écoles publiques primaires et secondaires (Rapport de recherche; programme Actions concertées; Fonds de recherche du Québec – Société et culture). Repéré à

www.frqsc.gouv.qc.ca/fr/la-recherche/la-recherche-en-vedette/histoire/determinants-et-consequences-de-l-epuisement-professionnel-dans-les-ecoles-publiques-primaires-et-secondaires-lsbxju9r1515426097314

Gaudet, L. (2004). L’épuisement professionnel chez les enseignants (Essai présenté comme exigence partielle de la maîtrise en psychologie [inédit], Université de Québec à Trois-Rivières). Repéré à http://depot-e.uqtr.ca/4686/1/000111903.pdf

 

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  • Excellente suggestion de Manon….un mois l’été et deux blocs de deux semaines (novembre et février….des mois sans bcp de luminosité dans un hiver qui traîne longtemps).

    Encore faudrait-il établir un dialogue fécond entre les parents , élèves , enseignants(es) et organisation scolaire….pour que celà se réalise en tenant compte du lien famille-travail-école.

    Bonne Chance!

    Daniel Desjarlais
  • Pourquoi ne pas revoir le calendrier scolaire pour permettre aux enseignants et aux élèves de se ressourcer? Doit-on vraiment avoir des vacances estivales si longues sachant que les élèves perdent certains acquis?

    Manon