Recommandations pour favoriser la santé mentale des enfants pendant la pandémie de COVID-19

Lecture : 4 min.
Mis à jour le 10 Jan 2021

Temps approximatif de lecture : 3 et 4 minutes

Par :

Chantal Camden, Université de Sherbrooke (UdeS)

Elodie Hérault, Centre de recherche du Centre Hospitalier Universitaire de Sherbrooke

Catherine Malboeuf-Hurtubise, Université Bishop’s

Et

L’équipe PRISME-COVID-19

Depuis le début de l’année 2020, les enfants ont dû s’adapter à de nombreux changements dans les différentes sphères de leur vie (ex. : routine quotidienne en classe ou à la maison, suivis médicaux, loisirs). Afin de documenter l’impact de ces changements sur la santé mentale des enfants, une équipe d’une trentaine de chercheurs, de professionnels de la santé et de partenaires de divers organismes a mené une recherche pour synthétiser les connaissances scientifiques sur le sujet (Camden et al., 2020A). Les différentes études rapportent des inquiétudes concernant la santé mentale des enfants et des familles, particulièrement en ce qui concerne l’anxiété, l’ennui, l’irritabilité, le sommeil, entre autres. Aucune des études recensées en juillet 2020 n’avait cependant été réalisées dans le contexte québécois.

 

Source de l’image: ShutterStock

Qu’en est-il au Québec?

Des entrevues ont été réalisées auprès de 18 parents au cours de l’été 2020 afin d’ancrer les constats tirés des écrits scientifiques au contexte québécois. Les parents interrogés ont mentionné plusieurs inquiétudes liées aux routines et cycles de sommeil perturbés, à des sentiments inhabituels d’anxiété (qu’elle soit généralisée ou spécifique à certaines peurs, comme celle d’être atteint par la COVID-19 ou qu’un proche le soit) et d’isolement, ou à des signes de détresse psychologique (confrontation, colère, évitement).

En outre, le fait d’avoir vécu une période de deuil pour quelques familles a représenté une difficulté psychologique et émotionnelle supplémentaire à gérer pendant le confinement. Ces impacts rejoignent ceux tirés des écrits scientifiques (figure 1).

 

Figure 1 : Impacts de la pandémie sur les enfants de 5-12 ans et les familles

 

Des enfants et des familles plus vulnérables

Les familles dont les enfants présentaient déjà des difficultés (p. ex. dans leurs relations sociales, leur réussite éducative ou leur développement) avant la pandémie ou celles qui vivaient dans des milieux urbains sans accès à un espace privé extérieur semblaient généralement plus affectées. Notamment, le fonctionnement de certains enfants, en particulier ceux faisant face à des enjeux neurodéveloppementaux, a été mis à l’épreuve, entre autres par la réduction des suivis médicaux et des soins de santé habituellement offerts.

À ce sujet, un parent interrogé mentionne que « C’est eux qui vont être le plus difficile à récupérer, ceux qui avait déjà des difficultés, les écarts qui vont s’être creusés vont les avoir affectés encore plus. »

 

La santé mentale de plusieurs parents fragilisée

Les liens avec leurs réseaux (social ou de soutien) ont été réduits ou, pour certains, sont devenus inexistants. Certains parents, notamment ceux ayant un enfant avec des besoins plus complexes, ont souligné que leur santé mentale a été plus affectée par la pandémie, par comparaison à celle de leur enfant.

Un des parents interrogés rapporte à ce propos : « Ça a été beaucoup ma frustration […], on n’a pas pensé à l’impact psychologique sur les parents que ça avait, et puis que malheureusement […], ça avait un impact psychologique sur les enfants. »

Le manque des réseaux de soutien

Plusieurs raisons ont été évoquées pour expliquer cette fragilité, notamment le manque de soutien disponible, le fait de se sentir submergé par les responsabilités, ou encore le manque de bienveillance du milieu scolaire envers les besoins particuliers de leur enfant. D’ailleurs, les familles qui avaient un filet social solide et diversifié autour d’elles (famille, amis, école, collègues), y compris des personnes pivots (proches aidants, intervenants, éducateurs, enseignants), ont apprécié le répit offert par leur présence/soutien. Tel que le mentionne un parent interrogé, « En même temps, on avait les grands-parents qui ont donné un bon coup de main […]. Ça, ça aidait, puis ça changeait parfois la dynamique. […] [Les enfants] avaient plusieurs personnes à qui parler. »

 Des éléments positifs

Plusieurs familles ont également relevé des impacts positifs du confinement sur la santé mentale de leur enfant, notamment la diminution des demandes sociales (p. ex. la participation à des fêtes familiales, le déplacement pour les activités extrascolaires), la possibilité d’avoir plus de temps en famille et la révision des priorités familiales.

 Comment réduire les écarts qui se creusent entre les familles?

Cette étude souligne l’importance de veiller à la santé mentale et au bien-être éducatif de tous les enfants, de repérer ceux qui vivent des moments difficiles et de s’assurer de leur fournir le soutien nécessaire (Camden et al., 2020B). Ceci implique une concertation entre les familles, les équipes-écoles, les professionnels de la santé et des services sociaux ainsi que les partenaires communautaires au sein d’un continuum de services. Des mesures générales devraient être mises en place pour tous les enfants, et d’autres mesures plus spécifiques pour ceux qui ont des besoins particuliers, selon une approche graduée de services (figure 2).

Figure 2 : Modèle de continuum impliquant la collaboration des réseaux santé-éducation-communauté-famille

Pour renforcer ce continuum, les acteurs qui en font partie (p. ex. les intervenants scolaires) devraient être outillés afin de pouvoir repérer les enfants plus à risque de subir des impacts négatifs, tout en veillant au bien-être de tous les enfants.

Références

Camden, C., Malbœuf-Hurtubise, C. , équipe PRISME-COVID-19 (2020A, novembre). Les répercussions de la pandémie de la COVID-19 sur la santé mentale des enfants de 5-12 ans et les défis particuliers vécus par les enfants ayant un handicap ou une condition de santé chronique : une synthèse des recommandations (Rapport final; document rédigé dans le cadre d’une étude financée par les Instituts de recherche en santé du Canada [IRSC]). https://labo-grandir.com/wp-content/uploads/2020/11/Camden_Rapport_IRSC_COVID.pdf

Camden, C., Malbœuf-Hurtubise, C., équipe PRISME-COVID-19 (2020B, novembre). Recommandations pour veiller à la santé mentale des enfants pendant et après la pandémie de la COVID-19. Résumé politique pour les milieux scolaires (Document rédigé dans le cadre d’une étude financée par les Instituts de recherche en santé du Canada [IRSC]). https://labo-grandir.com/wp-content/uploads/2021/01/Re%CC%81sume%CC%81-politique-e%CC%81ducation-PRISME-COVID-19-FR.pdf 

Source de l’image: ShutterStock

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