Comment développer la compétence interculturelle des éducatrices en service de garde

Lecture : 4 min.
Mis à jour le 12 Juil 2020

Temps approximatif de lecture : 3 à 4 minutes

par France Dumais

Une formation continue en milieu de travail a permis aux éducatrices d’un centre de la petite enfance (CPE) en milieu pluriethnique de développer une compétence interculturelle ayant égard aux enfants immigrants et à leurs parents, ainsi qu’à des collègues de travail. Pour ce faire, les éducatrices ont changé leur cadre de référence et mis en place de nouvelles pratiques éducatives adaptées au contexte pluriethnique. Dans un article traitant de la question, deux chercheures de l’UQAM, Manon Boily et Mélissa Bissonnette, examinent comment s’est développée la compétence chez les éducatrices et présentent les résultats issus de la recherche collaborative effectuée avec le CPE.

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Compétence interculturelle

Importante pour le vivre-ensemble, la compétence interculturelle consiste dans la capacité d’ajuster la communication et d’interagir adéquatement dans des situations interculturelles. En effet, les différentes cultures en présence dans un milieu devraient faire preuve de respect mutuel, et ce, tout particulièrement dans les services de garde éducatifs qui accueillent des enfants et des familles issues de l’immigration.

Boily et Bissonnette avaient relevé des lacunes dans la formation initiale des éducatrices à la petite enfance en ce qui concerne l’éducation ethnoculturelle. Pour pallier ce problème et permettre aux éducatrices d’apprendre à s’ajuster à la diversité ethnoculturelle, les chercheures avancent que la formation continue, sur ce plan, peut s’avérer une option intéressante.

Formation continue en milieu de travail pour développer la compétence interculturelle

En collaboration avec une chercheure experte dans le domaine de l’éducation interculturelle et de la diversité ethnoculturelle, la direction d’un CPE en milieu pluriethnique de Montréal a organisé et mis en place des activités de formation continue à l’intention de l’équipe éducative. Le but étant de soutenir les éducatrices dans leur réflexion, dans leur apprentissage et dans le développement de nouvelles façons de penser, d’être, de faire ou d’agir en contexte pluriethnique. Sept éducatrices du CPE en question ont participé à la recherche. Fait intéressant à noter, elles représentaient à elles seules quatre cultures (Canada, France, Haïti et Chine).

La formation continue offerte à ces éducatrices se déclinait sous les trois formes suivantes :

  1. Un groupe de discussion d’une durée de 90 minutes dont une chercheure universitaire assurait l’animation. L’objectif de ce groupe de discussion consistait à démystifier chacun des sujets de questionnement des éducatrices en témoignant de ses propres expériences (ex. : « Comment se comporter face à une culture qui est différente de la nôtre? »);
  2. Deux questionnaires présentés respectivement à un mois d’intervalle : le premier traitant notamment des changements que le groupe de discussion a occasionnés dans les pratiques éducatives, et le second servant à clarifier et à donner des exemples concrets des nouvelles pratiques mises en place;
  3. Une communauté d’apprentissage, d’une durée de trois heures et demie, et animée par une chercheure expérimentée dans la sphère de la compétence ethnoculturelle, visait à obtenir de nouvelles informations sur ce que le groupe de discussion avait apporté aux éducatrices et sur ce que le partenariat établi dans les mois suivants avait donné.

Résultats de l’étude

Les résultats de l’étude collaborative mettent en lumière les bienfaits de la formation continue sur le développement de la compétence interculturelle. En effet, les éducatrices participantes rapportent que leur participation au groupe de discussion a fait émerger chez elles de nouveaux savoirs, savoir-être et savoir-agir à l’égard des enfants et des parents de diverses origines ethnoculturelles, ainsi que de leurs collègues issues ou non de l’immigration. Leur compétence s’est développée sur cinq plans :

  1. Attitudes (ex. : une éducatrice dit avoir développé une plus grande ouverture envers les autres cultures);
  2. Aptitudes(ex. : une éducatrice affirme avoir appris à ne pas juger un enfant immigrant sur ses valeurs culturelles et familiales);
  3. Connaissances et compréhension (ex. : une éducatrice déclare que le groupe de discussion lui a permis de connaître la différence de pensée et de valeurs entre les parents nés au Canada et ceux qui y ont immigré; elle comprend désormais que des phrases comme « ici, on ne fait pas ça comme ça » créent des barrières entre les immigrants et les non-immigrants);
  4. Cadres de référence (ex. : une participante fait dorénavant preuve de flexibilité en posant des questions aux parents immigrants sur leurs pratiques familiales au lieu de se baser sur des préjugés ou des suppositions);
  5. Actualisation de la compétence interculturelle(ex. : une participante dit être plus attentive aux habitudes culturelles des enfants immigrants pour mieux les comprendre, et avoir donné la priorité à la compréhension du comportement des enfants plutôt qu’au respect des règles établies).

Conclusion

Boily et Bissonnette concluent leur article sur les bienfaits du groupe de discussion pour les éducatrices du service de garde pluriethnique montréalais, qui ont vu leurs valeurs et leurs pratiques se transformer à la faveur des enfants, des parents et des collègues de travail provenant de différentes communautés ethniques et culturelles.

Référence

Boily, M. et Bissonnette, M., (2019). Le développement d’une compétence interculturelle chez les éducatrices en milieu de garde éducatif pluriethnique. Revue des sciences de l’éducation de McGill, 54(3), 443-463. https://www.erudit.org/fr/revues/mje/2019-v54-n3-mje05322/1069764ar.pdf

Pour aller plus loin…

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